Club de lecture no 6

Numéro 15: 13/01/2023 Blue Pool Road Actualités 1ère

Aliénor Pabiot présente Pour vous servir, de Véronique Mougin, à la suite de sa lecture de Chanson douce, de Leïla Slimani. Le personnage principal est une gouvernante, en bute à toute une série d’interdictions et d’injonctions qu’elle a du mal à intégrer. Mais elle comprend vite que sa principale obligation est d’essayer de rester invisible.

Le deuxième ouvrage choisi par Aliénor est Au cœur des ténèbres, de Josef Conrad, qu’elle a découvert dans une édition bilingue. Marlowe est envoyé par son entreprise à la rencontre de Kurtz, marchand d’ivoire en Afrique centrale et sorte de demi-dieu fou vénéré par les peuples locaux. La remontée du fleuve qui le conduit jusqu’à lui ressemble à une descente aux enfers, ou à une plongée « au cœur des ténèbres », à la rencontre des pulsions les plus inavouables de la psyché humaine. La traduction française du texte anglais révèle le travail du traducteur, qui doit traduire des métaphores d’une langue à l’autre. La lecture du roman de Conrad renvoie également au film de Francis Ford Coppola, Apocalypse Now, où l’on retrouve une atmosphère similaire, et un personnage, le colonel Kurtz, tout aussi fascinant et dangereux que son modèle dans le roman.

Elise Bernard présente Dictature 2.0, d’Olivier Mannoni. Rappelant certains récits dystopiques, il évoque la généralisation des caméras de surveillance et l’établissement d’un score social. Les conséquences de cette politique peuvent interpeler le lecteur, inquiet pour ses libertés individuelles, et de plus en plus soumis à un Etat autoritaire.

Elise reprend également sa présentation de L’Autre à distance, d’Anne Muxel, qui étudie l’impact de la Covid sur les interactions entre individus. Eloignement des familles, rapports plus distants entre les individus…la pandémie soulève quelques questions angoissantes.

Mme Guidevay présente Regardez-nous danser de Leïla Slimani.

Dans ce deuxième volet de la trilogie familiale commencée avec « Le pays des autres: la guerre, la guerre, la guerre », on découvre, toujours à travers la famille Belhaj – inspirée par celle de l’auteure – , un nouveau pan de l’histoire du Maroc post-colonial. La guerre est maintenant loin derrière, le Maroc n’est plus sous protectorat français et vit sous le règne d’Hassan II dont la police politique réprime la moindre opposition. Les mouvements d’émancipations, la bourgeoisie marocaine privilégiée qui s’ouvrent au capitalisme, les aspirations hippies (une communauté hippie s’est installée à Essaouira après mai 68) s’opposent à la répression que connaît le pays durant les années de plomb suite au coup d’Etat avorté de juillet 1971.

M. Loggia présente ensuite le roman Paradis, d’Abdulrazak Gurnah, auteur tanzanien né à Zanzibar et Prix Nobel de littérature en 2021.

Nous suivons le parcours d’un jeune garçon, Yusuf, qui vit dans l’insouciance de son enfance jusqu’au jour où ses parents, incapables de payer leurs dettes, doivent le céder à son « oncle Aziz ». Le roman évoque ainsi, en filigrane, l’accaparement des terres et des ressources par les Européens et, peut-être davantage encore, la perte d’identité et la dissolution des mystères d’une Afrique en passe de changer à jamais.

Yanis Loggia
Professeur de Lettres

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